Santé environnementale : l’impact des polluants sur la santé des femmes

Santé environnementale : l’impact des polluants sur la santé des femmes ©Getty - Alexandr Dubynin
Santé environnementale : l’impact des polluants sur la santé des femmes ©Getty - Alexandr Dubynin
Santé environnementale : l’impact des polluants sur la santé des femmes ©Getty - Alexandr Dubynin
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L’impact de l’environnement sur la santé humaine est un enjeu de santé publique majeur. Quelles conséquences sur la santé des femmes en particulier ? En partenariat avec la Fondation pour la Recherche Médicale.

Selon l’OMS 23% des décès et 25% des pathologies chroniques dans le monde peuvent être attribués à des facteurs environnementaux.

Par définition, l’exposition à ces facteurs environnementaux varie en fonction du contexte et son impact sur la santé est très variable selon les personnes. Des travaux récents montrent l’importance d’intégrer la dimension du genre dans ce champ de la recherche, suggérant des inégalités d’impacts en particulier sur la santé des femmes. Pourtant les conséquences des polluants sur leur santé sont aujourd’hui encore peu mesurées.

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C’est dans ce contexte que la Fondation pour la Recherche Médicale a lancé un appel à projets sur les risques environnementaux qui touchent plus spécifiquement les femmes.

  • Que sait-on des inégalités de sexe et de genre dans l’impact des polluants sur la santé ?
  • Quelles sont les pathologies qui touchent plus spécifiquement les femmes et pourquoi ?

Avec pour en parler :

Marina Kvaskoff, épidémiologiste et chercheuse Inserm, au Centre de recherche en épidémiologie et santé des populations, Villejuif. (Équipe « Exposome, Hérédité, Cancer et Santé »)
Véronique Maguer-Satta, directrice recherche CNRS au Centre de Recherche en Cancérologie de Lyon
Robert Barouki, médecin, biochimiste et toxicologue, chef du service de biochimie métabolique à l’Hôpital Necker-Enfants Malades

"L'exposome" : les effets de la pollution sur notre santé tout au long de notre vie

La Fondation pour la recherche médicale a présenté trois nouveaux projets pour mieux comprendre et prévenir l'impact de la pollution globale sur la santé des femmes, de tous les autres types d'exposition, complémentaires, autre que notre génome, qui influencent notre santé globale, avec des effets extrêmement larges, depuis notre naissance. Il s'agit de développer de nouvelles stratégies de prévention pour trouver des marqueurs d'exposition, pour identifier des populations qui seraient le plus à risque, prendre en compte les prédispositions génétiques. Parmi elles, la toxicologie moderne a pour but de mieux comprendre les caractéristiques qui font qu'une substance risque d'être pathogène, pour essayer de prédire si telle ou telle substance présente des risques toxiques prédisposant aux maladies.

L'exposome est un concept introduit en 2005 par Christopher Wild, un épidémiologiste du cancer. Vincent Bessonneau, directeur au département sciences et santé environnementale de l'École des hautes études en santé publique, définissait le concept en mars 2022 : "c'est avant tout un changement conceptuel dans la façon dont on appréhende les liens entre la santé et l'environnement. Tout ce qui est lié à l'environnement urbain, les changements climatiques, mais également l'accès à des ressources au sein d'une communauté ou d'une ville, tout ce qui va être lié aux comportements de consommation, donc l'exposition à des substances chimiques qui vont être liées à la prise de médicaments à l'eau du robinet, l'air qu'on respire dans les villes, mais également dans les logements. Toute cette myriade d'expositions crée un mélange qui a un impact fort sur la santé de la population et la santé de l'individu."

En termes de mortalité, la pollution de l'air présente des impacts majeurs à différents niveaux sur notre santé, à tel point que le monde de la recherche peine encore à tous les identifier. Elle serait le déterminant le plus important devant le tabagisme selon le médecin biologiste Robert Barouki : "Aujourd'hui on est capable de dire que presque un quart des décès sont liés à l'environnement. La pollution de l'air joue le plus, à peu près à 75 %. La liste des polluants auxquels nous sommes exposés est si longue qu'elle nécessite des études épidémiologiques, expérimentales très poussées. Malheureusement, la pollution touche pratiquement toutes les pathologies chroniques qu'elles soient pulmonaires, cardio vasculaires, cancéreuses et impacte notre santé dès notre enfance".

La pollution des plastiques

L'impact des plastiques est particulièrement important, puisque nous y sommes exposés en permanence, et nous respirons, consommons une substance qui se décompose perpétuellement. C'est ce qu'explique la chercheuse Véronique Maguer-Satta : "dans la fabrication des plastiques, on trouve un certain nombre de molécules, dont le bisphénol A qui a été remplacé par d'autres molécules pour permettre certaines réactions chimiques toxiques dans ces plastiques".

Affaires sensibles
55 min

La santé des femmes plus exposée aux effets polluants

Biologiquement, les perturbateurs endocriniens jouent très différemment sur les récepteurs hormonaux des hommes et des femmes qui seraient ainsi beaucoup plus sensibles physiologiquement face aux risques de cette exposition de la pollution. Sauf que si la prise en compte du genre n'est pas quelque chose de nouveau dans le domaine de la santé publique, Robert Barouki déplore que la santé publique ait pris beaucoup de retard, car elle a longtemps été freinée par le sexisme médical qui considérait que la santé des femmes était par essence dysfonctionnelle et physiologiquement pathologique : "la recherche sur la santé des femmes a pendant longtemps été altérée par des biais sociaux énormes parce que, précisément, on ne prenait pas en compte les différences biologiques qui existaient entre les hommes et les femmes dans ce domaine de santé-là, par exemple sur des pathologies hépatiques communes entre hommes et femmes, où la manifestation peut être différente. On a privilégié pendant longtemps les études et les conséquences chez l'homme pendant les études. Aujourd'hui, on ne peut plus ignorer ces différences biologiques et sociales entre les femmes et les hommes. D'où la nécessité de passer à des modèles expérimentaux qui soient le plus prédictif possible".

Ces différences de vulnérabilité entre les hommes et les femmes face aux toxiques environnementaux ont pu être étudiées dans le cadre des recherches thérapeutiques contre le cancer du sein notamment.

Les différences entre les hommes et les femmes qui expliquent que, face à un polluant, on ne réagit pas de la même manière, s'étudient en fonction de trois niveaux selon le biologiste :

  • Le type d'exposition en fonction du secteur d'activité professionnelle
  • Une fois qu'on est exposé, l'assimilation des polluants peut être différents car notre processus biologique varie et va faire en sorte que l'on stocke plus ou moins longtemps un certain nombre de polluants.
  • La physiologie rentre en compte, car un perturbateur endocrinien ne va pas perturber de la même manière les hormones féminines et masculines. On a des impacts qui peuvent être très différents. D'où la nécessité de faire des études individuelles sur les deux sexes. On ne peut pas se contenter de l'un pour transposer à l'autre.

Si Véronique Maguer-Satta nous apprend qu'il y a surtout des différences de réactions, d'exposition à des moments différents dans la vie d'une femme qui peuvent être différents de celle d'un homme, en fonction de son âge : "Avant la puberté, plus tard pendant une éventuelle grossesse, durant la ménopause, et après, les effets et les risques varient chez la femme et ne seront pas les mêmes que ceux des hommes. Raison pour laquelle il faut systématiquement différencier les impacts de la pollution de l'air".

L'impact de la pollution dans le développement de l'endométriose ?

Si on ne sait pas grand-chose des facteurs de risque de l'endométriose de manière générale, Marina Kvaskoff ne manque pas de souligner que le domaine de la recherche suspecte l'impact des perturbateurs endocriniens puisque la maladie est une maladie hormono-dépendante et tout ce qui peut venir perturber le système hormonal pourrait avoir une certaine plausibilité biologique dans l'étiologie de la maladie : "Au niveau des polluants chimiques, si les études ne sont pas encore pleinement probantes, quelques méta-analyses montrent un impact potentiel des dioxines, des polychlorobiphényles et des pesticides organochlorés".

L'impact de la pollution dans le développement du cancer du sein ?

C'est le plus fréquent chez la femme, il représente 33 % des cas de cancers féminins. Véronique Maguer-Satta s'intéresse à l'impact des polluants (comme les bisphénols et les nanoparticules de plastiques) sur le développement de cette maladie. Elle étudie l'ensemble de ces mécanismes d'altération des cellules cancéreuses pour essayer de cibler des molécules qui interviennent à différents moments de la maladie, et celle dont l'évolution pourrait être directement liée aux expositions environnementales. Elle soupçonne leur impact dans une sous-population de cellules cancéreuses qui pourraient être soit à l'origine des rechutes et du processus qui fait qu'une cellule saine devienne un jour une cellule malade : "Comme ces cellules accumulent des anomalies, elles peuvent subir un certain nombre d'expositions".

🎧  La suite à écouter…

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Le Téléphone sonne
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  • Pierre Vassiliu

    L'amour amitié

    Album Succes de 1970 a 1976/Collection Master Serie (1970)

    Label POLYGRAM

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